Un nouvel Espace Mis & Thiennot voit le jour à Chaillac (36310)

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Gérard Mayaud, 1er vice président du Conseil Départemental de l’Indre, mais surtout et avant tout, Maire de Chaillac – commune située au sud du département –, l’avait annoncé lors de l’inauguration de Beaulieu, le 14 septembre 2019 : « Chaillac sera la vingt-sixième commune à baptiser un Espace au nom de Mis & Thiennot !« .  Et ce fut chose faite ce samedi 14 décembre 2019 où nous étions une bonne cinquantaine à honorer cet événement et ce, malgré un temps venteux et pluvieux qui s’était joint au rendez-vous.

La veille, une projection du film de Dominique Adt à la salle des fêtes avait suscité un débat des plus riches.   

Inauguration à Chaillac de l'espace Mis et Thiennot le 14 décembre 2019
Débat lors de la projection du film de Dominique Adt à la salle des fêtes

Photos réalisées par Dany Biais et Christian Pineau, membres administrateurs du Comité de Soutien


Mots de la présidente, Helga Pottier

Mis et Thiennot, ces deux noms sont bien connus en Berry, ils font partie de la mémoire collective. On se souvient de cette affaire qui a défrayé les chroniques à maintes reprises, on sait que c’est une terrible erreur judiciaire, on sait que ce n’est toujours pas réglé, qu’ils ne sont toujours pas innocentés. Mais on ne connaît pas vraiment les détails, c’est souvent plutôt confus. Donc un petit rappel des faits :

En janvier 1947, huit jeunes chasseurs sont accusés du meurtre d’un garde-chasse, Louis Boistard, retrouvé dans un étang près de Saint-Michel-en-Brenne. Pendant leur garde à vue, ils subissent des interrogatoires musclés que l’on doit appeler de la torture. Après huit nuits de ce traitement, tous signent des aveux préparés à l’avance. Ils arrivent à la prison de Châteauroux dans un tel état que les gardiens appellent le médecin pour qu’il constate que ce n’étaient pas eux qui leur avaient causé les blessures : hématomes, oreilles décollées, dents cassées, phalanges éclatées, côtes cassées, poumon perforé, testicule écrasé – le constat est très lourd.
Malgré cela, et en dépit des preuves matérielles qui seront toutes invalidées, Raymond Mis et Gabriel Thiennot sont condamnés par trois Cours d’Assises à 15 ans de travaux forcés. Leurs camarades d’infortune, eux, feront 18 mois ou 2 ans de prison. Ils s’appellent Emile Thibault, Gervais Thibault, Stanislas Mis, André Chichery, Bernard Chauvet et Jean Blanchet.
Il était pourtant facile de trouver le vrai coupable, proche du lieu de la découverte de la victime, si on s’était donné la peine de chercher. Et si on avait interrogé les nombreux témoins qui contredisaient la thèse officielle.
Mais pour la justice, les aveux sont la reine des preuves, et ceci même quand ils sont obtenus sous la torture. C’est cela qui est honteux, révoltant et inacceptable. Inacceptable sur un plan moral, mais aussi inacceptable sur le plan juridique. Car la France a signé la convention internationale contre la torture de New York en 1984. La justice, d’ailleurs, reconnaît que Raymond, Gabriel et les autres ont subi des violences, les rapports des enquêteurs de nos cinquième et sixième requêtes l’attestent ainsi que l’avis de l’avocat général en mars 2014.

Alors, il faut changer la loi : si les faits de torture sont avérés, une révision de procès devrait être accordée systématiquement. Nous demandons donc aux élus de notre département de proposer un amendement à la loi qui régit les révisions de procès. Il est impératif que des aveux obtenus sous la torture ne puissent être pris en compte.

Dans notre combat, nous avons une aide considérable. Elle nous vient des communes qui nomment un lieu public «Mis et Thiennot».

Chaillac est la vingt-septième commune à honorer ces deux victimes d’un acharnement judiciaire. Monsieur le Maire, vous et votre Conseil municipal avez le courage de montrer votre désaccord avec les décisions que les juges ont rendues dans cette affaire. Vous rendez hommage à des gens qui ont porté toute leur vie le poids d’une condamnation injuste et infondée. Nous vous remercions très chaleureusement pour ce geste généreux.

Pourquoi se battre 73 ans après les faits ? «Pour l’honneur» avait répondu Gabriel Thiennot au journaliste qui lui a posé la question un jour sur un plateau télé.Pour l’honneur de Raymond, Gabriel et leurs six camarades, mais aussi pour l’honneur de la justice car elle s’honorerait à reconnaître son erreur. Cela correspondrait enfin à l’idée que nous nous faisons de la Justice (avec un grand J). Nous ne pouvons plus accepter une justice qui se cache derrière la (soi-disant) «vérité judiciaire». Nous ne pouvons plus accepter une justice qui ferme les yeux sur ses erreurs du passé.

La loi doit changer pour que la commission de révision puisse enfin accepter de rejuger cette affaire, que les magistrats revoient le dossier avec un regard impartial, qu’ils admettent l’erreur de leurs confrères et qu’ils rendent enfin justice à Raymond et Gabriel.

Helga Pottier, Présidente du Comité de Soutien pour la Révision du Procès Mis et Thiennot