De tous les cancers dont souffrent et meurent les sociétés, l’erreur judiciaire est celui qui suscite un unanime sentiment de révolte, lequel est probablement lié au fait que ce terrible dysfonctionnement soit directement provoqué par l’institution ayant précisément la charge d’administrer la justice. Cette justice avec un J majuscule qui est, si l’on s’en réfère à la définition qu’en donne le Larousse, « la vertu morale qui fait rendre à chacun ce qui lui est dû ».
Vaste débat que celui de définir ce qu’est ou ce que devrait être la justice idéale…
L’Affaire Mis et Thiennot est tout à fait révélatrice de ce regrettable dysfonctionnement judiciaire.
En effet, avec l’affaire Seznec, elle est celle qui pose encore problème aux instances judiciaires de notre pays et ce, plus de soixante ans après les faits…
Elle est exemplaire de ce que peut être une erreur judiciaire. Tout y est :
- de graves lacunes au niveau de l’enquête (une enquête sélective, qui ne retient que certains témoignages, qui n’emprunte qu’une seule piste…),
- des preuves matérielles apparaissant montées de toutes pièces par les enquêteurs pour les besoins de leur curieuse démonstration,
- une version des faits en total désaccord avec les conclusions du rapport d’autopsie (rapport d’ailleurs raturé, surchargé…),
- des conclusions parfois grotesques par le détail de certaines circonstances,
- des témoignages à charge plus ou moins fragiles, suspects même pour certains (des erreurs, des contradictions, des oublis…)…
Tout y est, même des aveux !
Pourtant, depuis leur inculpation en janvier 1947, Raymond Mis, Gabriel Thiennot ainsi que leurs six camarades : Gervais et Emile Thibault, Stanislas Mis, Bernard Chauvet, Jean Blanchet, André Chichery, n’ont cessé de clamer leur innocence.